« Gilets jaunes » : le virage vers l’économie circulaire est-il une réponse ?
Il n’est pas anodin que l’actuelle révolte d’une partie de la population française, visiblement largement soutenue dans l’opinion, s’opère dans un contexte d’accélération des dérèglements climatiques, de conquête des océans par les plastiques, de pollutions en tous genres et de dégringolade de la biodiversité. Contrairement aux affirmations des « climato-sceptiques » qui opposent ceux qui manifestent en France et en Europe à ceux qui veulent sauver la planète, l’actuelle effervescence puise, de toute évidence, ses ressorts dans les mêmes causes. En effet, s’il y a un point commun entre les « Gilets jaunes » et les « Ecologistes-bobo-végans » que tout semble opposer, c’est bien la volonté d’en finir avec « l’économie du gaspillage » qui a prédominé au XXème siècle, corolaire de la modernité et du progressisme, et de refermer très vite cette « parenthèse industrielle » de quelques décennies qui aura suffi à mettre en péril un monde qui tourne depuis plus de 4 milliards d’années !
Car le sentiment partagé est celui que c’est à la génération post-moderne de tenter d’endiguer les tsunamis, de passer la serpillière, de payer les pots cassés à coup de taxes baptisées écologiques et de convaincre ceux qui ne veulent pas encore entendre qu’il y a urgence de revenir à une économie guidée par le bon sens.
Oui, le bon sens !
Celui d’une consommation raisonnable et d’une production raisonnée, qui ne seront plus basées sur la consumation de masse d’objets dont la déchéance, quand elle n’est pas purement et simplement programmée, s’inscrit dans son cycle économique.
Cette économie du bon sens a aujourd’hui un nom : l’économie circulaire.
Un modèle qui semble être le seul à pouvoir nous faire espérer préserver durablement nos niveaux de vie sans continuer de mettre en danger notre monde.
Un modèle qui apporte des réponses crédibles aux questions de la limitation de la ressource, de la réduction des déchets et plus généralement des conséquences de notre façon de vivre sur la nature.
Un modèle qui n’a enfin rien d’innovant puisqu’il ne fait que « revenir à » la façon dont tournait le monde d’avant la parenthèse consumériste, « revolvere » en Latin, qui est ni plus ni moins que l’étymologie du mot « révolution ».
Pour mener à bien cette révolution, la seule bonne volonté de quelques uns ne suffira pas et il faudra, sans aucun doute, y adjoindre la contrainte. Une contrainte qui ne peut visiblement plus peser davantage sur le citoyen-consommateur mais qui devra s’imposer équitablement aux différents acteurs économiques et aux Etats.
Avec une nouvelle réglementation approuvée par les Etats membres en mai 2018, l’Europe a clairement affiché son ambition de devenir le chef de file mondial dans le domaine de l’économie circulaire. Un nouveau cadre qui a vocation à s’imposer au monde pour la « sauvegarde de la Maison commune ». Mais encore, et de façon pragmatique, à constituer un puissant levier pour le développement de nouvelles filières industrielles européennes tant dans les secteurs de la gestion et du recyclage des déchets que dans ceux de l’éco-conception.
Voilà enfin une direction, un « bon sens » à donner à la transformation, cette fameuse injonction propre à la modernité contemporaine qui ne dit pas trop où elle nous mène mais qui peut devenir un puissant projet politique et fédérateur, en disant vers quel but elle se dirige.
Article original sur Les Echos